Les "Caractères" Gays numéro 2


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E Nolde






















Suite au premier article sur les nouveaux "Caractères" à la manière de La Bruyère, voici une petite suite... le filon est important...


ZIGGY* - *toute ressemblance avec un personnage de chanson est pure coïncidence...

Malgré la morsure des déceptions, la brûlure de l’oubli, l'insensibilité des êtres rencontrés, et malgré le triste horizon que lui offrent tant de garçons sans soleil intérieur, mais qui lui ressemblent pourtant, Ziggy continue à marcher devant lui. Certes, il avance péniblement, pareil au promeneur solitaire à contre vent qui parcours une plage de sable. Il fait partie de cette humanité singulière qui a le sexe de ses sentiments et la définition de ses rêves ; il est trop lui-même pour rencontrer ceux qui ne sont réellement personnes sauf des masques interchangeables : visages vides, reflets de flaque d’eau, dessins avortés. Il échappe aux normes car son authenticité a la rareté du radium et sa luminescence.


SUPER EGO

Superego croit avoir réussi, il a la mine florissante d’un beignet tout juste sorti de sa friture, encore gorgée de tout le frémissement qu’il sent autour de lui pour lui. Il est si intelligent, si époustouflant, si autodidacte et si savant, si parfait qu’il n’envisage même pas une quelconque critique ! Elle est donc balayée d’un revers de main si elle se présente et il prend l’habitude de regarder son interlocuteur sans vraiment le regarder, seuls lui suffisent des ovales de têtes anonymes capables d’être le miroir de ses victoires et de son emprise. Son auditoire ressemble à un regroupement d’esclaves prêt à récolter la manne sortie de la bouche de leur maître. Il rappelle la grenouille de certaines fables qui se gonfle d'importance, donnant de multiples détails inutiles sur sa vie et s’engouffrant avec volupté dans son roman personnel. Il rejoint la cohorte de tous ceux qui ne peuvent imaginer au-delà d’eux-mêmes, englués dans le bassin glauque de leur petit monde où ils pataugent sans fin.


E Nolde


PFITOU

Pfitou est léger comme son ombre, ondulant et épais comme un vêtement que l’on aère ; il tient de la musaraigne et du Roi Soleil. Sa petite taille, sa fausse quarantaine et son raisonnement de travers, font de lui une bizarrerie de la nature. Sorte de fossile incongru dont la principale activité est d’en imposer aux autres par un style désuet et factice. Ce lézard est en trompe l’œil comme le décor de son antre : un goût surfait, épais qui est dans l’imitation accentuée façon trait de caricature, le toc le disputant au vulgaire. Il donne dans les attentions pour masquer son insensibilité, car il a toujours le secret espoir d’emmener quelqu’un dans son lit mais vous oublie très vite quand il comprend que vous ne l’y rejoindrez pas. Il passe dans le fleuve de la vie comme un serpent d’eau, profitant des reflets qui ne sont pas les siens pour donner l’illusion d’une couleur personnelle.


La lettre d’IMOMWA avant de disparaître

« L'autre m'a toujours paru indispensable : indispensable dans mon quotidien, dans le tissage d'une toile d'ami-e-s qui devient une étoile de vie, dans ma famille avec ma mère et ma sœur, ma mère qui continue de subsister en moi, et indispensable dans mon corps affectif qui s'est transformé au fil des ans en château d'espérance... On ne se réalise pas sans le monde qui nous entoure et tous ceux qui à la manière de l'antihéros d'Into the wild n'y laissent que rupture, absence, égoïsme ne font qu'y préparer leur mort solitaire. J'ai cependant sans doute eu la folie de trop attendre de cet autre qui à l'évidence n'a pas ma façon de voir les choses, ni de les vivre, et encore moins de les partager. Le hic est de trouver la perle rare qui est en soi ce que le soleil est à notre univers : une vraie lumière qui donne vie. Ce qui ne lasse pas de m'étonner c'est de rencontrer si fréquemment cette incapacité chronique de savoir vivre et d'aimer qui touche tant d'hommes et de femmes. Tous on le réflexe des petits singes qui prennent avidement la nourriture qu'on leur tend, mais le moindre mouvement les fait fuir, en l'occurrence ici le mouvement du cœur. Ces petits singes, se posent-ils la question de savoir si vous vous avez assez de quoi manger une fois qu'ils disparaissent avec la nourriture offerte? L'essentiel pour eux est de prendre, le reste n'est même pas envisagé, ils forment le pendant opposé des personnes qui préfèrent donner. Mais un don sans échange finit par être frustrant et perturbant. Beaucoup ignorent qu'ils sont l'enfer des autres de par leur mutisme, leur éloignement et leur renfermement. Qui a-t-il à l'intérieur d'une noix humaine? Qu'est ce qu'on y voit? Parfois pas grand-chose, en tout cas la lisibilité de certains actes n'est pas du tout évidente. Des personnes se rencontrent, semblent échanger, se confient, commencent à renforcer leurs liens, puis le cercle s'ouvre à d'autres ami-e-s en toute confiance.... C’est souvent à ce moment qu’une lézarde apparaît : d’abord fissure imperceptible, puis léger écaillage, pour finir par une brèche profonde. Vous êtes d’un côté de la brèche et l’autre en face avec un-e « ami-e » à vous. On ne se comprend plus ! Que s’est-il donc passé, quelle raison explique ce changement, pourquoi l’ami-e perd son visage familier pour redevenir un être lointain et si extérieur à vous ? Sans doute l’inconstance est-elle une première réponse pour caractériser l’être humain, et les « sables mouvants » dans lesquels se perdent les hommes dans leurs façons de concevoir le monde, dans leurs croyances, leurs peurs, leurs traditions et leurs coutumes, sont également un complément à cette réponse. Il est donc difficile par nature de trouver un être consistant et solide qui pense et agit en harmonie, dans la continuité et de façon indépendante. Les épaules « frères » ou « sœurs » tombent trop souvent en poussière lorsqu’on veut y poser la main : vous fréquentez une personne et elle devient un personnage qui se dérobe, une figure de sable qui aura pris un contour illusoire. Cette affection et cette tendresse vous la verrez cependant se reformer étrangement ailleurs, selon l’air du temps et des circonstances telle une luciole que l’on perd des yeux un instant et que l’on retrouve déjà si éloignée. Je continue de souffrir de cela, et cette inconsistance humaine me fâche et me révolte ! Bien vain combat qui épuise et n’apporte aucune solution. Je n’ai pas encore atteint cette distance qui n’est ni de la froideur ni de l’indifférence mais qui permet d’accepter l’inconséquence et l’insouciance du monde, certes pénibles, comme on admet la rupture d’un chemin lors d’une randonnée. »

E Nolde






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